21
Mar
2023

Poésie

En cette Journée moniale de la poésie, Domenja Lekuona nous propose ce poème de Marcelle Delpastre.

La pierre

calam

 

 Je ne sais pas si elles saignent, les pierres. Si elles crient, si elles
hurlent sous la roue et la masse, et le fil du couteau s’il les blesse,
à pleine viande, en les tranchant.

Je sais, l'argile qui en coule parfois, pour si rouge qu’elle soit, ce
n'est pas du sang.

Et je ne dirai rien de leur tendresse, de pierre à pierre, de l'eau à
l'air...

Mais ce que je sais, c’est que notre sang vient de la pierre. Et notre
chair ne vient pas d’ailleurs, elle redevient pierre parce que nous
sommes pierre, nous sommes poussière et fumée de vent.

Que notre sang est sang de pierre, et notre chaleur de soleil, et
notre bramée le cri de la pierre, et notre âme s’y repait à plein
coeur, parce que nous sommes l'âme de la pierre – mais dites, la
pierre, elle qui est pierre – d'où vient-elle ?

Camins dubèrts, anthologie bilingue de la poésie occitane contemporaine, présentée par Jean Eygun, Letras d’Òc, 2011
"La pierre" Marcèla Delpastre, p. 82.

28
Déc
2022

Pas pour rien, le rapport à la langue

couv quos pas per resTrente poèmes courts intercalent l'occitan et le français. Trente poèmes où la langue interroge la langue, où on assiste à un va-et-vient entre les deux langages, sans frontière claire. 

La Périgourdine Adeline Yzac n'est pas à son coup d'essai. Depuis Les larmes de mon père (1995) et D’enfança d’en fàcia (1998), on compte plus de trente livres et quatre prix littéraires. 

Les mots semblent arriver natruels, sauvages et, comme par enchantement, ils s'apprivoisent, se composent. D'ailleurs, l'autrice le dit elle-même :

le poème
voudrait
atteindre
toucher au point

le mot
fait défaut

lo poèma
voldriá
juntar
tocar al punt
ont
l’i manca
la paraula

 

 

07
Sep
2022

La murène attendra, un livre à hauteur d'humanité

couverture murenaDanièle Estèbe-Hoursiangou écrit à hauteur d’humanité. Ce qui ne veut pas dire qu’ici se bousculent les bons sentiments d’une bienveillance fonctionnant trop souvent, à l’heure actuelle, comme une véritable injonction sociale. Au contraire : l’autrice nous plonge dans un drame existentiel – l’inexorable éloignement psychophysique de celui qui fut et reste son unique amour – sans guère
nous ménager. Les choses sont dites à hauteur de sentiments mêlés, contradictoires, violents, à hauteur d’une folle lucidité, voire d’une nécessaire pensée magique, sans concession aucune aux modes, aux mensonges de la bonne conscience, et à l’inhumanité rampante d’un scientisme cool qui prétend avoir le dernier mot sur notre condition.

Ce que ce livre manifeste, par son dire original et prenant, par sa force extraordinaire et poussée à l’extrême, c’est qu’en deçà et au-delà de la vérité de la science, toujours seconde, le premier et le dernier mot appartiennent à notre subjectivité, cette vérité existentielle toute puissante qui se confond avec notre vie-même et ne cesse de hanter la littérature et les arts. Un livre qui nous entraîne loin au cœur de la complexité humaine.

Un livre à méditer.

Éric Fraj

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